La première « disciple-missionnaire »

Le soleil commence tout juste à poindre ses premiers rayons. Une femme enveloppée de noir, les yeux tirés par les larmes, court en toute hâte vers le tombeau, le cœur accablé de tristesse. Rien ne peut l’arrêter. Chargée de ses flacons d’aromates, elle veut se rendre auprès du cadavre de Jésus pour l’honorer avec le plus grand soin. C’est sa manière d’aimer. Elle lui doit tant ! Il y a tout juste quelques mois en effet, alors qu’elle était possédée par sept démons qui la torturaient jour et nuit dans une vie de désordre, Jésus de Nazareth est venu la délivrer. Elle n’oubliera jamais ni cette rencontre qui a définitivement changé sa vie, ni son regard miséricordieux qui l’habite toujours. Elle court, elle court, mais la pierre est roulée et le tombeau est vide ! Stupeur ! Prenant Jésus pour le jardinier, elle finit enfin par reconnaître le ressuscité au son de sa voix qui l’envoie témoigner auprès des disciples : « Va trouver mes frères pour leur dire que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. » (Jn 20) Laissant là ses aromates, Marie Madeleine retourne à Jérusalem et devient l’apôtre des apôtres, la première « disciple-missionnaire » messagère de la bonne nouvelle du Christ ressuscité !

Ce récit si touchant de Marie Madeleine au matin de Pâques ne doit pas rester pour nous sans effet. Il nous rappelle que notre identité de chrétien n’est pas d’abord une décision éthique, ou une grande idée, mais une rencontre personnelle avec le Christ ressuscité. Cette rencontre change tout : elle donne à notre vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive. Comme les premiers disciples, comme cette foule innombrable de saints qui nous ont précédés depuis 2000 ans, il est impossible de garder pour nous cette bonne nouvelle. Oui, nous sommes tous appelés à être missionnaires : ce n’est pas d’abord une question de charisme ou de personnalité, une question de formation ou de diplôme. Non, depuis le matin de Pâques, être chrétien c’est être missionnaire, c’est un tout indissociable car c’est la logique même de l’évangile ! Le pape François n’affirme pas autre chose quand il écrit dans Evangelii Gaudium (en 2013) : « Tout chrétien est missionnaire dans la mesure où il a rencontré l’amour de Dieu en Jésus Christ ; nous ne disons plus que nous sommes disciples et missionnaires, mais que nous sommes disciples-missionnaires. »

Même si nos cœurs sont accablés de tristesse, même si nos vies sont blessées par nos démons qui nous tourmentent parfois, Jésus vient à notre rencontre et nous envoie témoigner que son Amour est plus fort que la mort ! A la suite de Marie Madeleine, nous sommes tous disciples-missionnaires ! Le croyons-nous vraiment ?

Père Edouard Delafon, curé